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Andrée OGER, conseillère départementale communiste de l'Eure Andrée OGER est maire honoraire de Croth, conseillère départementale de Saint André de l'Eure et chevalier de la Légion d'Honneur.

Espagne : un maire communiste pille les supermarchés et entame une marche pour la résistance à l'austérité

Solidaire

Un maire communiste, député au parlement andalou, mène des actions contre l'austérité et pour défendre les millions d'espagnols plongés dans la détresse par la crise du système capitaliste.

Espagne-Sanchez-Gordillo-PCA-IU-2012.jpgJosé Manuel Sanchez Gordillo, maire communiste de la petite ville de Marinaleda, en Andalousie, est une figure contestataire connue en Espagne, où il participe depuis une trentaine d'années à des actions coup de poing pour dénoncer les inégalités sociales et l'action des partis politiques nationaux. Il participe notamment aux occupations de terres agricoles au profit de petits paysans.

Robin des Bois contre les supermarchés

Mardi 7 août, il a fait parler de lui au-delà des frontières espagnoles en dirigeant des razzias dans les rayons de deux supermarchés d'Andalousie pour redistribuer des chariots remplis de produits alimentaires à des ONG locales.

A une heure de grande affluence, des dizaines de personnes se sont ainsi introduites dans deux supermarchés andalous.

Dans le premier, un Mercadona à Ecija (entre Séville et Cordoue), les intrus sont entrés dans la grande surface sous l'oeil bienveillant du député régional de Izquierda Unida, Sanchez Gordillo. Fonçant à travers les rayons, ils ont rempli leurs chariots de produits de première nécessité. "Ni chocolats, ni yaourts, ni desserts, mais du sucre, de l'huile, des légumes, du lait", explique Diego Cañamero, secrétaire général du Syndicat andalou des travailleurs. N'ayant aucune intention de passer en caisse, les individus, qui clamaient leur intention de tout redistribuer à des cantines populaires, ont été pris à partie par des employés de la grande surface, provoquant une belle bagarre générale. Quand la peur de perdre son emploi vous conduit à être les exécutants des basses oeuvres de votre patron !...

Le même jour, dans un Carrefour situé à Arcos de la Frontera (près de Cadix), une opération à peu près identique a été menée, avec une issue toutefois plus pacifique, le centre commercial ayant décidé d'offrir aux militants une dizaine de chariots d'une valeur de 1 000 euros. "Le moment est arrivé de mener des actions qui frisent l'illégalité, parce qu'il y a des gens pour qui tout va mal, et nous ne pouvons pas rester les bras croisés", a déclaré un syndicaliste impliqué dans l'opération à un journaliste de El Pais.

Mercadona a porté plainte. Le ministère de l'Intérieur (de droite) a jugé cette action "intolérable", et a envoyé dès le lendemain un mandat d'arrêt contre les protagonistes.

À l'indignation de la droite, qui impose l'austérité et défend les banques espagnoles, s'est ajoutée celle d'une partie de la gauche qui a dénoncé l'irresponsabilité de l'élu. C'est le cas du président socialiste d'Andalousie, José Antonio Grinan qui a déclaré : "C'est de la barbarie d'attaquer un supermarché quand on est député". Il est vrai que, côté barbarie, les socialistes espagnols ont été sévèrement châtiés par les électeurs aux dernières élections, eux qui s'évertuent à renvoyer en masse dans la misère les populations espagnoles !

La nourriture subtilisée lors de ces raids a été refusée par la Banque alimentaire, étant donné "l'irrégularité" de leur obtention. Banque alimentaire qui ne se pose pas la question de la légitimité de cette crise qu'elle compense !

Les provisions ont finalement été distribuées gracieusement dans les rues de Séville.

Une marche contre l'austérité

Ce Jeudi 16 août, cet élu du parti de gauche Izquierda Unida, âgé de 59 ans et que certains ont déjà baptisé "le maire Robin des bois", a entamé une marche de trois semaines. Il va sillonner l'Andalousie pour dénoncer les mesures d'austérité adoptées par le gouvernement espagnol et convaincre les maires de petites ville comme la sienne de ne pas coopérer.

L'Andalousie est une des régions d'Espagne les plus touchées par la crise, avec 33,92 % de sa population au chômage. Symboliquement, Sanchez Gordillo partira de la ville de Jódar, qui détient le triste record de chômage de la région. "Il y a des personnes qui n'ont pas les moyens de manger. Au XXIe siècle, c'est une honte absolue", a dit le maire. Avec cette marche de trois semaines il veut mettre en lumière les conséquences humaines de la situation économique en Espagne.

Le gouvernement du premier ministre Mariano Rajoy prévoit d'économiser 102 milliards d'euros d'ici à la fin de 2014, avec comme première partie le plan de rigueur de 65 milliards annoncé en juillet. Ces économies prévoient notamment des rentrées évaluées à 35 milliards d'euros avec des hausses d'impôt, dont la TVA à partir du 1er septembre, des coupes dans la fonction publique ainsi que dans les budgets régionaux de la santé et de l'éducation.

Parmi les mesures que José Manuel Sanchez Gordillo conseillera aux maires de suivre : mettre un terme aux licenciements et aux expulsions de locataires et ignorer les demandes du gouvernement central quand celles-ci concernent des coupes dans les budgets.

Ses actions et sa popularité grandissante dans un contexte de crise énervent passablement les responsables espagnols, Mariano Rajoy en tête. "Vous ne pouvez pas jouer à Robin des bois et au shérif de Nottingham. Cet homme ne cherche qu'à se faire de la publicité sur le dos de tout le monde", a dit Alfonso Alonso, porte-parole du Parti populaire (PP), la droite post-franquiste au pouvoir.

"Ils disent que je suis dangereux, répond Sanchez Gordillo. Et les banquiers qui sont disculpés après avoir fraudé ? Ils ne sont pas dangereux ? Et les banques qui empruntent à la BCE à 1 % et revendent cette dette aux Espagnols à 6 %, ce n'est pas dangereux ?"

En tant qu'élu du Parlement d'Andalousie, José Manuel Sanchez Gordillo bénéficie de l'immunité parlementaire. Mais il assure être prêt à y renoncer. "Si je finis en prison parce que j'ai pointé du doigt les effets de la crise, ce sera un honneur pour moi", avait-il dit après l'opération contre les supermarchés, qu'il avait conduite, mégaphone à la main, avec le Syndicat andalou des travailleurs (SAT).

Depuis, sept personnes ont été interpellées et le maire de Marinaleda, conforté par le soutien populaire et la médiatisation, a décidé de franchir un palier. "Juan Manuel Sánchez Gordillo n'a sans doute jamais été aussi populaire pendant sa longue carrière de gauchiste utopique", note, ironique, le journal socialisant El Pais. Ce n'est pas le cas des leaders socialistes, jaloux va !

L'intéressé préfère parler des réalisations de sa municipalité de Marinaleda. Son village de 2 645 habitants connaît le plein emploi grâce aux fermes coopératives qu'il a instaurées pour les chômeurs, parfois en confisquant la terre.

En Espagne, comme partout, des Indignados aux mineurs de charbon, les mouvements sociaux doivent imposer le tempo et les décisions aux politiciens et à leurs donneurs d'ordre de la finance.

Les communistes sont au premier rang pour effectuer ce travail d'information et de convition et contribuer au succès des actions de résistance populaire.

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