Après la retraite, et si on revenait sur les congés payés ?
La compétitivité : voilà la clé dans le discours libéral !
Il faut être compétitifs, diminuer "le coût du travail", adapter nos vies à l'évolution du monde, satisfaire les marchés financiers sinon condamner notre pays à voir partir ses entreprises et ses emplois... tel est le discours fataliste et soumis que l'on nous transmet depuis des années.
Déjà, depuis les années 80, le fatalisme général a permis aux entreprises d'augmenter les salaires beaucoup moins vite que l'inflation et que la hausse du PIB. Résultats : d'un côté le pouvoir d'achat décroche, de l'autre les dividendes versés aux actionnaires augmentent. Entre rémunération du travail et rémunération du capital, l'équilibre s'est rapidement inversé et ce sont aujourd'hui 10 points de PIB (10 %, en clair) qui sont partis des poches des producteurs (salariés ou indépendants) vers la finance et la spéculation.
Entre blocage des salaires et du SMIC et flexibilisation du travail (avec la multiplication des CDD, intérims, temps partiels), un travailleur aujourd'hui produit autant de richesses que cinq travailleurs des années 60. La productivité a été multipliée par 5 en quelques décennies mais ce ne sont pas les salariés qui en profitent !
Car, en dehors du salaire, les travailleurs ont beaucoup perdu d'avantages sociaux ces dernières décennies : déremboursements médicaux et recul de l'âge de départ en retraite sont également des pertes financières indirectes pour les salariés !
Ces reculs ont été fait pour, soi-disant, "rééquilibrer les comptes sociaux", Sécu, Caisses de retraite,...
Il faut cotiser plus et bénéficier de moins de remboursements pour boucher un "trou de la Sécu" qui, d'années en années, ne fait que s'agrandir. Rien que ce constat devrait mettre la puce à l'oreille de chacun : si cette technique n'a pas produit d'effets positifs en trente ans, c'est qu'elle n'est pas bonne ! Non ?
Les partisans des "économies" sur le dos des salariés oublient de parler de deux facteurs qui pèsent très lourdements sur les comptes de la Sécu et de l'Etat : d'une part, les allègements de cotisations sociales des entreprises, et, d'autre part, le poids du chômage.
Les deux sont d'ailleurs liés puisque "l'allègement des charges sociales" vise (c'est ce qu'on nous explique !) a diminué le chômage ! Et pourtant, la courbe du chômage est orientée dans le mauvais sens depuis 1974 !
En ajoutant régulièrement de nouvelles exonérations de "charges sociales" pour les entreprises, les gouvernements successifs ont volontairement creusé le déficit de la Sécu et des caisses de retraite ! Et comme l'Etat est sensé compenser ces allègements de charges, c'est le déficit de l'Etat qui s'agrandit !
Si on s'arrête quelques instants sur ce sujet, on comprend que, finalement, une belle partie du financement de la part patronale de la Sécu est désormais pris sur les comptes de l'Etat donc dans les poches des contribuables, c'est-à-dire : des salariés !
Le deuxième facteur qui pèse lourdement sur les comptes de la Sécu et de l'Etat, c'est le chômage.
Evidemment, plus de chômeurs, c'est moins de cotisations sociales, moins d'impôts et de TVA dans les caisses de l'Etat. C'est aussi moins de consommation donc... moins de ventes de la part des entreprises, et moins de clients potentiels pour les commerçants et artisans.
La conséquence logique d'une politique qui consiste à laisser filer de la richesse vers le capital au détriment du travail, donc de la grande majorité de la population, c'est cette détérioration des comptes publics.
Les caisses de retraite ne sont pas épargnées par ces politiques. Elles aussi n'arrivent plus à équilibrer leurs comptes entre les cotisations sociales entrantes et les pensions versées.
Là aussi, depuis vingt ans, ce sont les salariés qui sont mis à contribution. Ceux en activité comme ceux qui sont en retraite.
L'indexation des pensions de retraite sur l'inflation (qui augmente moins vite que les loyers, le gaz ou l'électricité) et non plus sur les salaires (indice tiré vers le haut par les hauts salaires !) a entrainé une érosion du pouvoir d'achat des retraités, d'années en années.
Ensuite, les multiples réformes des retraites qui se sont succédées ont toutes entrainé un recul de l'âge réel de départ en retraite pour beaucoup, et une baisse des pensions versées aux nouveaux retraités, puisque le calcul des pensions se fait sur les 25 meilleures années désormais (avant : 10) sans oublier que de plus en plus de travailleurs partent en retraite avec des carrières "incomplètes" selon les nouveaux critères de calcul !
Sur les retraites également, les multiples réformes qui se succèdent n'ont pas résolu le problème de déficit qu'elles étaient sensées résoudre !
Chômage qui grimpe depuis trente ans, déficits sociaux qui s'accroissent, déficit public qui grandit et avantages sociaux qui disparaissent,... les politiques menées ces trente dernières années sont un échec pour le pays et pour le peuple français.
Mais elles ne sont pas un échec pour les milieux financiers, les grands patrons et les quelques milliers de gros actionnaires de ce pays, en clair pour le capital !
Pour revenir au début de cet article, la répartition des richesses produites (par les travailleurs) en France, et caractérisées par le PIB, a évolué au détriment des travailleurs. Alors que l'ensemble des richesses produites en France continue d'augmenter chaque année, même mollement (c'est le taux de "croissance" !), ces richesses vont de plus en plus enrichir le capital (capital fixe des entreprises, dividendes versés aux actionnaires) au détriment du travail, c'est-à-dire des salaires et pensions mais aussi des avantages sociaux (aides sociales, gratuité des services publics,...) !
Boucher le trou de la Sécu et résorber le chômage passent d'abord par une autre distribution des richesses, qui fasse la part belle aux investissements productifs et durables, seuls capables de créer de l'emploi et de générer des impôts pour l'Etat et des cotisations pour les organismes sociaux.
C'est loin d'être acquis !
La réforme des retraites envisagées par le gouvernement socialiste s'inscrit dans le cadre libéral des reculs sociaux précédents !
Certains médias, comme Christophe Barbier, directeur de "L'Express", parlent maintenant de revenir sur la cinquième semaine de congés payées !
Travailler une semaine de plus pour votre employeur pour le même salaire ! Moderne, non ?
La fatalité n'existe pas en politique ! Trente ans de chômage organisé et de reculs sociaux planifiés sous l'égide d'une Europe au service des multinationales et de gouvernements acquis au libéralisme, ont finit par convaincre bon nombre de travailleurs de l'absence d'issue politique à la crise capitaliste.
Ils nous parlent de "coût du travail" ? Exigeons que l'on nous parle du "coût du Capital" !
Il nous parlent de "compétitivité" et de "concurrence" ? Parlons d' "efficacité sociale et environnementale" et de "coopération" !
C'est en luttant ensemble contre ce fatalisme organisé, en exigeant une autre répartition des richesses produites en France, en rééquilibrant les rapports économiques mondiaux, que l'on sortira de l'ornière libérale et de la voie vers la misère que nous promet le capitalisme.