Charlie Hebdo/CHARB : « j'ai quasiment toujours voté communiste »
A ceux qui veulent rendre neutre, insipide, "consensuelle", l'image de Charlie Hebdo, voici une interview de Charb, directeur de la publication de Charlie. Elle date du 7 juin dernier.
Avec lui, d'autres membres de l'équipe étaient proches du parti communiste, à l'image d'un Wolinski qui avait réalisé une très belle affiche pour la Fête de l'Humanité (ci-dessus) ou de Tignous, qui collabora à l'Humanité Dimanche et à la revue "Révolution".
Charlie-Hebdo, poil-à-gratter du système, Charlie Hebdo qui vomissait les religions et l'extrême-droite, FN en tête, Charlie Hebdo est la tête de pont, le vaisseau amiral, la grande gueule de la liberté d'expression dans ce pays.
Et comme tout journal satyrique, ça faisait des fois rires jaunes ou pas rires du tout les coincés du cerveau, les fous de dieu de toutes les religions, les tenants de la défense de la race aryenne et autres paranoïaque de l'invasion immigrée.
Et même à gauche, même chez nous, l'humour iconoclaste de Charlie Hebdo nous laissait parfois dans le doute.
Charlie HEbdo reprend sa parution mercredi prochain.
Longue vie à Charlie Hebdo !
Puisse l'équipe de survivants emboîter le pas de ceux qui ont quitté involontairement le bateau et continuer à emmerder la bienpensance et les bonnes manières de la dictature molle que nous subissons actuellement !
Solidaire
CHARB, le dessinateur et directeur de la publication de Charlie Hebdo était l'invité, le 7 juin 2014, de la fête de l'Humanité, aux Argoulets, où il était venu débattre sur le Front national. Interview

J'ai une vraie proximité avec l'Humanité, d'abord parce que je dessine depuis longtemps déjà dans l'édition du dimanche et aussi en semaine, en plus de Charlie Hebdo. Je suis proche des idées défendues ici et je connais bien Roselyne de la librairie de La Renaissance qui fait un boulot formidable. J'ai répondu avec plaisir à l'invitation pour débattre notamment sur le Front national.
Le communisme est-il encore une idée neuve ?
Oui, bien sûr, je rêve de l'Union soviétique de l'Union européenne. Pas sur le modèle qui a fait faillite à l'Est, évidemment. Mais je crois que le communisme est une solution à la crise. J'en vois pas d'autres. Je manque peut-être d'imagination, mais j'ai quasiment toujours voté communiste. J'ai juste failli prendre ma carte au Parti socialiste quand j'étais au lycée. Il faut dire que dans ma famille, on était plutôt PS.
Charlie Hebdo s'est beaucoup investi dans le débat sur les caricatures de Mahomet, comment analysez-vous le phénomène jihadiste prégnant à Toulouse ?
Personne ne conteste le phénomène de ces jeunes qui partent pour le Jihad, c'est une réalité et il y a un vrai danger. Mais je crois que le risque est surévalué et qu'ils ne sont pas si nombreux. On fait beaucoup plus de bruit autour de ce risque-là que sur le nombre de tués à la Kalachnikov, à Marseille. Il ne faut pas avoir peur plus que de raison. Il faut faire attention à l'aspect médiatique, car à force de raconter qu'ils sont puissants, ils vont finir par l'être. Les médias peuvent conforter le phénomène et renforcer dans leur détermination des individus qui sont d'abord isolés. Heureusement, pour une fois on ne fait pas l'amalgame entre ces jihadistes et les musulmans.
Comment voyez-vous l'avenir de la presse, notamment satirique ?
C'est catastrophique. La crise s'est rajoutée aux problèmes qui existaient déjà avant. Je ne vois pas comment la presse papier peut s'en sortir, d'autant que la situation du réseau de distribution se dégrade très vite. Paradoxalement, à Charlie Hebdo et dans la presse satirique en général, on est plus protégés, parce qu'on est sur une niche où il y a peu de concurrence. Mais on vit difficilement, on a pas de réserve. On va proposer une formule sur le net, mais ça ne compensera pas la baisse du papier.
Un message pour cette fête ?
Oui, un message d'espoir. Je veux dire aux gens que la contestation la colère, les critiques contre les élites sont légitimes. Le problème, c'est quand ils votent FN au lieu de voter PC. Ce que je ne comprends pas, c'est qu'on a le droit de critiquer l'idéologie et les politiques du FN, mais pas les électeurs. Ils souffrent sans doute, sont malheureux, d'accord, mais pour moi, ce sont des salauds. La spécificité du vote FN, c'est que c'est d'abord un vote raciste anti-immigrés. Sinon, ils voteraient à gauche...
La Dépêche du Midi - le 7 juin 2014