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Andrée OGER, conseillère départementale communiste de l'Eure Andrée OGER est maire honoraire de Croth, conseillère départementale de Saint André de l'Eure et chevalier de la Légion d'Honneur.

CNRS: la fronde des chercheurs provoque le report de la réforme

Solidaire

Les chercheurs et universitaires hostiles à la découpe du CNRS en instituts se sont regroupés devant le siège parisien de l'organisme et en ont bloqué la tenue du conseil d'administration. Catherine Bréchignac, directrice du centre national de recherche, va recevoir une délégation de chercheurs dans l'après-midi pour discuter le plan de réforme.

Depuis mercredi 11 juin circule une pétition, déjà signée par plus de deux cents médaillés du Centre national de la recherche scientifique, de l'INRA ou de l'INSERM, et rejoints par une centaine d'autres.

La fin des sciences sociales et de la biologie?

Ils entendent protester contre les réformes portées par la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, devant s'appliquer au CNRS:

"Nous, enseignants-chercheurs, chercheurs ou ingénieurs des universités ou des organismes de recherche, sommes fiers de faire de la recherche (…) Pourtant, nous sommes inquiets."

Les points qui fâchent: la réorganisation du CNRS en "instituts nationaux" et par disciplines; un nouveau système de financement, avec des budgets affectés par instituts; une relance poussée des partenariats avec le privée.

Les manifestants craignaient que les responsables du CNRS ne votent un texte "qui, à terme, signifierait le démantèlement de cet organisme en instituts indépendants où il n'y aurait plus, ni sciences sociales et humaines ni biologie)".

D'après le collectif Sauvons la recherche, "ce texte confirme que la direction du CNRS accepte la demande ministérielle de découper le centre en instituts nationaux, en laissant volontairement de côté certains secteurs".

Depuis sa création en 1939, le CNRS accusé d'immobilisme et de gaspillage

Des spécialistes évoquent la question sur leurs blogs. Des positions sans équivoque. D'abord, petite piqûre de rappel dispensée par Damien Besson, étudiant en biologie à l'université d'Angers, sur la situation du centre de recherche:

"Le CNRS, c'est l'incarnation de la science française, l'interdisciplinarité, près d'un quart du budget de la recherche publique, 30 000 salariés, 1250 laboratoires, et l'organisme européen qui publie le plus. Depuis sa création (1939), les mêmes critiques se font entendre: immobilisme, gaspillage, incapacité à collaborer avec l'industrie."

L'annonce de la division du CNRS en huit instituts fait craindre aux chercheurs la perte de leur indépendance face au politique. Valérie Pecresse, pour qui la modernisation est inévitable, cherche à rassurer:

"Le CNRS reste entier, il a le même périmètre, les personnels gardent le même statut, mais il doit être plus ouvert."

La communauté des chercheurs demeure méfiante. Dans son blog, Stéphane Mazouffre, réagit en toute bonne foi:

"Au départ, l'idée est relativement bien accueillie par l'ensemble de la communauté scientifique française qui sent bien que le modèle sur lequel elle repose est mal adapté aux réalités du XXI siècle. [Mais] comme à son habitude, le gouvernement ne va prendre en compte aucune des recommandations et propositions faites par les experts mandatés et va piloter, sans donner d'explications, une réforme certes silencieuse, mais capitale pour l'avenir."

Le blog L'Université, la recherche évoque l'existence d'un sigle curieux: NMP. Il s'agit du "nouveau management public", un "courant de réforme venu des pays anglo-saxons qui vise à gérer les services publics comme des entreprises sans que l'on se pose vraiment la question de la pertinence de la transposition de ces techniques du monde de l'entreprise à celui des laboratoires et des universités".

En clair, toujours d'après ce site, "une pression est mise sur les chercheurs pour 'rendre des comptes' (…). Aujourd'hui l'Etat veut un droit de regard sur la recherche parce qu'il la finance et parce qu'elle joue un rôle majeur dans l'économie."

Le pilotage par les pouvoirs publics aura l'effet inverse de celui qu'il prétend obtenir

Sur Sauvons l'Université, on lit ainsi:

"Le pilotage de la recherche voulu par les pouvoirs publics et imposé aux scientifiques aura l'effet inverse de celui qu'il prétend obtenir. Ses contraintes et ses modalités de fonctionnement vont conduire la recherche scientifique à respecter des normes et des usages qui créent structurellement du conformisme scientifique et à terme la stérilisation de la créativité."

Sur le blog qui héberge la pétition, Patrick Heuret, botaniste à l'INRA, apporte un témoignage lié à sa propre expérience:

"J'adhère particulièrement au fait que la recherche avance avant tout par coopération et non par compétition. Il est important de défendre ces valeurs et de ne pas céder à la peur d'être jugé négativement parce qu'on sort du moule; c'est la diversité des caractères et des compétences qui est la richesse de notre métier (et des relation humaines en général)."

Pour autant, la contestation ne fait pas bloc. Hervé Le Crosnier, maître de conférences en informatique en est la preuve:

"Le regroupement en instituts verticaux et thématiques, proposé par le gouvernement, est peut-être une solution à ce qu'il faut bien admettre comme étant une situation dramatique pour la recherche. Situation qui ne date pas du gouvernement actuel, ni même du précédent, mais renvoie à la faiblesse constitutive de l'investissement de la France dans la recherche, en terme de budget comme en terme d'image publique et cela par delà les partis et tendances qui on pu gouverner depuis trente ans."

Selon la direction du CNRS, un nouveau conseil d'administration devrait se tenir dans les vingt jours pour avaliser la réforme.

Vu sur Rue 89.

PS : restons mobiliser si nous voulons sauver notre recherche publique ! Solidaire.

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