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Andrée OGER, conseillère départementale communiste de l'Eure Andrée OGER est maire honoraire de Croth, conseillère départementale de Saint André de l'Eure et chevalier de la Légion d'Honneur.

Tentative de confiscation du vivant par les multinationales de la semence

Solidaire

On ose à peine le croire ! Un projet de loi à l'étude à l'Assemblée Nationale vise à imposer un certificat d'obtention végétale sur les semences pour empêcher les paysans de semer leurs propres semences fermières ! C'est donner tout bonnement à quelques entreprises privées les clefs du monde vivant !

J'ai hésité ce matin. Deux sujets méritaient d'être abordés.

Les profits se chauffent au gaz

Le premier sujet concerne la décision du Conseil d'Etat d'annuler la décision gouvernementale d'imposer un blocage des tarifs du gaz par GDF-Suez pour 2012 (le temps de la campagne présidentielle, du moins). Cette annulation a été faite à la demande des concurrents de GDF-Suez qui voulaient augmenter leurs tarifs, eux.

Cette décision illustre de manière scandaleuse pour les usagers, la nocivité de cette concurrence libre et non faussée que l'on nous a tant vantée pour nous faire avaler la pilule de la privatisation de l'ancien opérateur public GDF. La privatisation et l'apparition d'entreprises privées concurrentes n'ont pas fait baisser les tarifs et n'ont pas permis une amélioration des services aux usagers (rebaptisés clients dans la nomenclature capitaliste). Bien au contraire, c'est l'inverse qui s'est produit ! Les prix du gaz flambent, spéculation mondiale oblige et les "clients" se retrouvent coincer entre des "opérateurs" privés qui proposent tous des tarifs voisins, chers, pour des relations avec la clientèle en nette baisse par rapport à ce que proposait autrefois le service public.

On retrouve la même situation avec l'électricité, elle aussi privatisée depuis quelques années.

Il y a quelques jours, des reportages montraient l'état de délabrement avancés des réseaux de distribution électrique, notamment en zones rurales. Des coupures à répétition, parfois plusieurs heures de suite, se multiplient. Le sud-ouest de la France semble particulièrement affecté. Là aussi, la privatisation et "l'ouverture du marché à la concurrence" a été un mal pour les consommateurs-travailleurs mais une source nouvelle de profits pour les investisseurs.

Moins de personnel et une recherche de bénéfices immédiats sont contradictoires avec la notion d'intérêt du consommateur. Ceux qui dénigrent le service public sans avoir d''argent à placer en Bourse devraient réfléchir à cette question avant de parler pour défendre des intérêts qui sont loin d'être les leurs !...

Le second sujet concerne l'agriculture. A priori.

Une taxe pour planter sa petite graine ?

Actuellement, au Parlement, on parle d'établir un Certificat d'obtention végétale sur les semences, voire même sur les animaux.

L'idée, selon ceux qui la défendent, c'est de protéger les obtenteurs de semences (les semenciers) des paysans qui réutilisent leurs semences d'une année sur l'autre. Selon les semenciers, il y aurait là un abus qui mettrait en danger l'avenir de la recherche privée dans le domaine des semences.

En clair, en réutilisant une partie de leur récolte, les paysans n'achètent pas de nouvelles semences et c'est autant de manque à gagner de la part des semenciers. Il s'agit d'abord d'une question d'argent, comme d'habitude dès que l'on parle du secteur privé. En effet, une dérogation est prévue pour quelques espèces en contrepartie du paiement de royalties aux actionnaires des entreprises financières : l'argent, ça ne se mange pas mais certains s'en empiffrent quand même !

Mais, au delà, ce qu'entraine cette loi, c'est l'interdiction pure et simple de réutiliser des semences fermières, celles que garde le paysan, d'une année sur l'autre.

Or, depuis l'aube de l'Humanité, depuis que l'être humain s'est mis à semer ou planter, il a TOUJOURS gardé une partie de sa récolte en vue de la ressemer l'année suivante. Cette pratique est devenue minoritaire en France, certes, mais elle est pratiquée naturellement depuis toujours, et est pratiquée massivement par la majorité des paysans du Monde, notamment dans les pays pauvres. Va t-on leur interdire également de garder leur récolte ? Et pourquoi ces semenciers privés ont-ils le droit de s'arroger le fruit de milliers d'années de sélections effectuées par des milliers de générations de paysans au cours des temps ?

C'est là, effectivement, que le débat dépasse le cadre de l'agriculture. La biodiversité, dans ce domaine des semences notamment, est un bien collectif de l'Humanité, au service de l'Humanité. C'est un héritage millénaire, vital pour notre alimentation et pour notre avenir.

Les semenciers, parmi lesquels le monstre Monsanto, mais aussi des groupes français, comme Limagrain, tentent tout bonnement de s'arroger le droit de choisir qu'elles seront les cultures et les variétés que pourront cultiver et consommer les humains dans le futur. C'est une privatisation de la biodiversité pour les cultures alimentaires !

Peut-on tolérer cela ?

En poussant la logique marchande jusqu'au bout, par lobbying, le groupe Monsanto tente de faire passer depuis mars dernier aux Etats-Unis une loi (la Résolution 875) sensée protéger le consommateur en interdisant les cultures non certifiées ou effectuées par des personnes dont la "qualification professionnelle" ne pourrait garantir la qualité des produits consommés. Cette loi américaine vise tout bonnement à interdire les potagers des particuliers.

En interdisant aux paysans d'utiliser leurs propres semences et en interdisant au particulier de cultiver son propres potager, les semenciers bouclent le marché et deviendraient les propriétaires absolus des semences et plants qui nourrissent l'Humanité. On n'ose imaginer l'appauvrissement total de la biodiversité qu'entrainerait cette décision ni le risque qu'encourerait l'Occident si, à l'avenir, une épidémie touchait une ou plusieurs cultures essentielles (blé, maïs, riz) à cause de l'utilisation massive d'une variété commerciale de semences non résistante à une maladie !

Interdire les semences fermières en France et interdire les potagers (aux US, pour l'instant) réaliseraient  le rêve des capitalistes dans le domaine du vivant puisque l'intégralité du marché serait confié à quelques grands groupes privés seulement, pour le seul bénéfice de leurs actionnaires !

Déjà coincés dans un modèle économique qui les pousse à surconsommer engrais et produits pesticides, les quelques paysans survivant à la sélection commerciale en cours seraient également coincés dans le choix de leurs cultures, de leurs plants et semences, et de leurs acheteurs.

Un esclavage des temps modernes avec l'apparence de la liberté !

Le monde paysan devrait remettre en cause son soutien très majoritaire à cette droite qui sert de porte-parole à l'agroindustrie.

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